Les modalités de cession impactent-elles le traitement fiscal de la plus-value ?

 

Les modalités convenues entre le cédant et l’acquéreur peuvent prévoir de différer tout ou partie du paiement du prix, de rendre indisponible une partie de celui-ci en bloquant une somme afin de constituer une garantie, et/ou qu’une partie du prix pourrait devoir être reversée à l’acquéreur, en cas de « sinistre ».

Les modalités retenues sont donc susceptibles d’impacter la trésorerie du cédant. Or, en parallèle, le fait générateur de l’imposition de la plus-value peut être le changement de propriété des titres (et non la perception du prix).

Il est dès lors important d’être en mesure d’anticiper le traitement fiscal afin, notamment, que le cédant puisse s’assurer que le fait de différer la perception de tout ou partie du prix ne le mettra pas en difficulté pour régler l’impôt de plus-value.

Quel est le traitement fiscal en présence d’un crédit-vendeur ?

La date à laquelle la cession à titre onéreux de titres d’une société générant une plus-value imposable doit être regardée comme réalisée est celle à laquelle s’opère le transfert de propriété, indépendamment des modalités de paiement et des événements postérieurs à ce fait générateur.

Autrement dit, la plus-value est considérée comme réalisée au jour de la vente, même si tout ou partie du prix n’a pas été versé, en raison de la mise en place d’un crédit vendeur.

Il convient donc de se montrer vigilant à se sujet, afin que le vendeur dispose de suffisamment de liquidités pour être en mesure de s’acquitter de l’impôt afférent à la plus-value.

On rappelle que l’impôt de plus-value dû au titre d’une cession réalisée en année N devient exigible en année (N+1), suite au dépôt de la déclaration de revenus (N+1) des revenus (N) et à la réception de l’avis d’imposition correspondant. A l’heure actuelle, l’impôt correspondant est à régler en 4 mensualités, en principe de mi-septembre à mi-décembre (N+1).

Malgré ce principe d’imposition « immédiate », il existe une possibilité d’étalement sous certaines conditions (article 1681 F du CGI). Il faut notamment que l’entreprise cédée soit une PME et que la vente porte sur la majorité du capital.

Par ailleurs, pour bénéficier de l’étalement, il convient d’en faire la demande en proposant un plan de règlement échelonné.

La durée de celui-ci  ne peut pas excéder celle prévue pour le paiement total du prix de cession ni se prolonger au-delà du 31 décembre de la cinquième année qui suit celle de la cession.

Il convient également de présenter des garanties à l’administration fiscale (par exemple une garantie bancaire ou un nantissement d’actifs). Si les garanties lui apparaissent insuffisantes, l’administration peut demander la constitution de garanties complémentaires. A défaut, ou si le contribuable ne respecte pas ses obligations fiscales courantes, l’administration peut refuser ou dénoncer le plan de règlement échelonné (ce qui implique donc le paiement immédiat de la totalité de l’imposition liée à la plus-value).

Quel est le traitement fiscal des compléments de prix (earn-out) ?

Les compléments de prix ou « earn-out » sont eux aussi imposables selon les règles applicables aux plus-values de cessions de valeurs mobilières.

Les compléments de prix doivent présenter un caractère aléatoire à la date de réalisation de la vente. Ils ne doivent pas constituer en réalité la rémunération de l’activité ou d’une prestation fournie par le cédant.

Le fait générateur d’imposition est constitué par le versement du complément de prix.

Le complément de prix est imposé au titre de l’année au cours de laquelle il a été reçu par le vendeur.

Si la cession initiale a bénéficié d’un abattement (général ou renforcé) pour durée de détention, et que le cédant opte pour l’imposition du complément de prix au barème, l’abattement s’applique de la même manière au complément de prix afférent à cette cession.

En cas d’abattement pour durée de détention, on retient la durée qui s’est écoulée entre la date d’acquisition des titres et celle de leur vente. Le fait qu’un délai de plusieurs années se soit écoulé entre la vente des titres et la perception du complément de prix n’a donc pas d’impact sur le taux d’abattement applicable à la plus-value.

Si la cession a été réalisée après le 31 décembre 2017, a bénéficié de l’abattement fixe de 500 000 € pour dirigeant partant à la retraite, et que cet abattement n’a pas été totalement utilisé, le solde peut être reporté sur le complément de prix perçu si celui-ci est versé avant le 31 décembre 2024

Les garanties d’actif et de passif (GAP) et les séquestres ont-ils un impact fiscal ?

La constitution de garanties d’actif et de passif (GAP) et l’éventuel placement de sommes sous séquestre, pour sécuriser l’acquéreur, n’impactent pas le calcul de la plus-value et de l’impôt dû sur celle-ci.

Autrement dit, le cédant sera imposable sur la totalité du prix de vente des titres, même si une partie des sommes demeurent indisponibles pendant la durée d’existence de la garantie.

Si la garantie est mise en œuvre par l’acquéreur, le vendeur peut être tenu de lui rembourser une somme d’argent, ce qui diminue son gain au titre de la vente.

Si l’exercice de la GAP a lieu la même année que celle au cours de laquelle est intervenue la cession, le cédant en tient compte lors de la souscription de sa déclaration de revenus : le prix de cession à prendre en compte dans la déclaration est diminué du versement effectué par le cédant en exécution de la clause de garantie d’actif ou de passif.

Si l’exercice de la GAP a lieu au cours d’une année postérieure à celle de la vente des titres, le cédant doit demander la réduction (et le remboursement) de l’imposition initialement établie en adressant une réclamation auprès de son service des impôts.

Il convient de se montrer vigilant sur les délais de réclamation, afin d’éviter la prescription.

En effet, pour être recevable, cette réclamation doit être présentée à l’administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant la date à laquelle le versement effectué au titre de la garantie revêt un caractère définitif.

Exemple : Soit une cession de droits sociaux stipulant une clause de garantie de passif conclue le 16 juin N. L’impôt dû par le cédant est mis en recouvrement en N+1.

En N+2, le cédant reverse une partie du prix de cession au cessionnaire en exécution de la clause de garantie de passif dont la portée n’est pas contestée. Dans ce cas, le cédant a jusqu’au 31 décembre N+4 pour présenter une réclamation au service des impôts.